Organisation / Cours C1

 

 

 

 

 

 

Fiche de lecture

réalisée par

Eric Duchemin

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CNAM

Développement des systèmes d’organisation

Année 2001/2002

 

 

 

 

 

 

 

Sommaire

 

 

 

Page de titre de l’ouvrage étudié 3

I Biographie 4

II Postulats 4

III Hypothèses 5

IV Méthode de démonstration 6

V Résumé 7

1re Partie Ce que culture veut dire 8

2e Partie Culture et pratiques managériales 14

3e Partie Manager les différences culturelles 20

VI Principales conclusions 27

VII Actualité de la question 28

 

 

 

 

 

 

 

 

S.C. Schneider et J.-L. Barsoux

 

HEC University of Geneva

INSEAD

 

 

 

 

 

Managing across cultures

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Financial Times / Prentice Hall

1997

 

 

I / Biographie

 

Suzan C. Schneider enseigne le Management des Ressources Humaines à HEC / Genève (Suisse), et les comportements organisationnels à l’INSEAD (France). Ses recherches se concentrent sur la stratégie, tant celle des managers que celle des organisations. Elle travaille également sur le management multiculturel et s’implique activement en apportant son aide aux entreprises souhaitant réussir leur internationalisation. Docteur es-Psychologie clinique, Suzan C. Schneider a dirigé un service hospitalier.

 

Jean-Louis Barsoux enseigne à l’INSEAD (France). Il écrit des articles publiés dans l’Harvard Business Review et le Financial Times. Il est l’auteur de nombreux livres, dont Management in France (avec Peter Lawrence, Cassell, 1990), The Diversity of Management (avec Rosemary Stewart, Macmillan, 1993) et Funny Business : Humour, Management and Business Culture (Casell, 1993).

 

 

II / Postulats

 

Les auteurs nous font prendre conscience que les relations d’affaire s’effectuent de plus en plus avec des entreprises étrangères. Ce phénomène qui donne lieu à des collaborations entre nationalités différentes concerne aussi bien l’ensemble des fonctions de l’entreprise que tous les niveaux hiérarchiques.

Chaque pays a sa propre culture. De ce fait, et suite à ce qui est exposé ci-dessus, les salariés d’entreprises étrangères entre elles entretiennent des relations multiculturelles.

Ces échanges entre cultures différentes sont très souvent source d’incompréhension, car chaque culture a ses propres présupposés. Ces derniers fondent nos croyances et nos valeurs, elles-mêmes caractérisent nos comportements et notre manière d’être.

Afin de limiter l’incidence des différences culturelles sur les relations d’affaires, un management multicuturel doit être élaboré.

Les auteurs affirment qu’au lieu de viser une unicité culturelle par la définition d’une culture unique, il est impératif de conserver chaque particularité culturelle. Bien managée, cette mosaïque où les valeurs de chaque culture restent présentes, donnera naissance à des avantages concurrentiels.

Les développements autour des variables multiculturelles façonnent également les organisations, par notamment la création d’équipes multiculturelles.

Enfin, la mondialisation s’imposant, la mixité culturelle crée aussi des problèmes d’éthique et de responsabilité sociale. Le management des organisations multiculturelles doit gérer ces particularités culturelles au niveau mondial.

 

III / Hypothèses

 

L’hypothèse de départ est que la culture est une énorme source d’énergie dans les relations d’affaires et les organisations faisant intervenir plusieurs cultures. En utilisant les différences entre les cultures, ils est possible de transformer cette énergie latente en création de valeur.

Les auteurs expliquent que l’environnement est commun aux organisations. Il est perçu différemment selon le filtre culturel que chacune de ces organisation utilise. Ce filtre est le résultat de l’interaction de sphères culturelles d’influence. La visualisation dans l’espace de ces sphères aidera le manager à mieux appréhender ses actions et à en prévoir les répercutions dans des milieux culturels différents.

L’incidence de ces décisions managériales, différentes selon les cultures, se retrouve au niveau de la structure des organisations et des processus. La stratégie élaborée par ces organisations sera mise en œuvre par des ressources humaines appropriées, l’hypothèse que stratégie et ressources humaines dérivent aussi de la culture est également posée.

En se dotant de compétence dans le domaine de la culture, les managers pourront alors tirer le meilleur profit de cette diversité. Ils transformeront les contraintes culturelles en avantages concurrentiels.

Toutefois, pour bénéficier au mieux des différences culturelles, le modèle d’organisation le plus approprié semble être celui des alliances d’entreprises. Il permet de concerver la maîtrise des cultures locales, tout en gagnant en taille dans le cadre des enjeux économiques internationaux.

La culture peut avoir une incidence majeure lorsqu’on aborde l’éthique et la responsabilité sociale. L’hypothèse d’une charte commune à tous est retenue par les auteurs et permettra de faire face aux risques mondiaux futurs.

 

IV / mode de démonstration

 

C’est grâce à la littérature internationale traitant du management, ainsi qu’au rapprochement d’observations et de recherches que les auteurs nous permettent de découvrir les différences culturelles. Ils font également appel à leur propre expérience en tant que professionnels et enseignants.

Les auteurs n’ont pas pour objectif de définir les meilleures pratiques managériales. Ils expliquent avant tout des grilles permettant d’analyser les cultures et d’extraire les particularités culturelles. Ces grilles d’analyse sont exploitables tant au niveau international, que celui régional, du métier ou du groupe, car elles mettent en évidence des sphères culturelles d’influence.

Des modèles permettent aux managers d’élaborer des organisations, des stratégies et la gestion des ressources humaines. De plus, ces mêmes managers comprennent comment un modèle peut être mis en place dans un nouvel environnement culturel.

Dans un but pratique, les auteurs sélectionnent des différences culturelles qui influencent le management. Ils expliquent comment les managers peuvent construire des organisations gagnant en valeur ajoutée grace à ces particularités culturelles.

 

 

V / Résumé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le management multiculturel

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1re Partie

Ce que culture veut dire

 

 

 

 

 

 

 

La face cachée de la culture

 

Les cultures convergent-elles ?

La mondialisation fait que les cultures semblent converger. Il est vrai que nous nous ressemblons de plus en plus tant dans la manière de nous habiller que dans nos habitudes quotidiennes. Néanmoins, les fondements culturels de chaque pays restent présents et se distinguent toujours les uns des autres. New-York est l’exemple type du melting-pot, toutefois, de près, on distingue clairement les ethnies habitant chacune leur quartier. Il en est de même de l’Europe au sein de laquelle les divergences culturelles ne cessent de s’accroître, depuis 1992.

Les styles de management convergent-ils ?

Pour ce qui est des études consacrées au management, beaucoup concidèrent que le management reste le management, où qu’il soit pratiqué. La notion de village global induit une convergence des pratiques managériales. Le management devient universel comme le sont les sciences et l’ingénierie. Seulement, lorsqu’on regarde de près, il n’en est rien ! des différences persistent.

Nous nous accordons tous à dire qu’il y a différentes techniques de management selon le niveau de développement technologique et économique. Ensuite, pour certains chercheurs, il

y a unicité des techniques managériales à même niveau de développement. Pour d’autres, il y a résistance aux idéologies étrangères. On constate en effet que plus l’intégration technique et économique augmente, plus les forces opposées au management universel s’activent.

Le village global semble plus être un rêve qu’une réalité.

La culture comme source d’avantages concurrentiels

En fait, la culture ne doit pas être un problème à gérer, mais une combinaison harmonieuse des ressources, marchés, gouvernements, stratégies, liens et relations. Une source d’avantages concurrentiels, si on réussit à dépasser les inconvénients. Au Japon, il y a les Keiretsu, des réseaux clients-fournisseurs, qui n’ont pas leur place dans des pays attachant de la valeur à l’initiative individuelle. Au Danemark, Janteloven signifie rester humble et éviter le comportement de supériorité. Le résultat est que les entreprises danoises n’ont pas pu faire face à l’ouverture des marchés européens, puis à celle des marchés mondiaux. Les pays scandinaves ont adopté principalement l’égalitarisme. Mais, ce qui a été un avantage peut devenir un talon d’Achille à l’avenir, chose également visible lors des regroupements d’entreprises au niveau international. Des conflits et incompréhensions peuvent apparaître à ce moment. Les raisons culturelles sous-jacentes sont très difficiles à déceler et même diagnostiquer. Souvent, c’est après le disfonctionnement complet de l’organisation que la cause des problèmes est élucidée.

Apprendre à connaître sa culture

La clé à tous ces problèmes d’ordre culturel tient dans l’évaluation de sa propre culture. Comment nous voyons-nous ? Comment les étrangers nous voient-ils ? Il faut éviter de prendre sa propre culture comme une référence et de hiérarchiser les civilisations. Discerner les différences culturelles devient une priorité. Il est ainsi possible d’anticiper les menaces potentielles et les opportunités économiques.

Rechercher les avantages concurrentiels

Reconnaître les différences culturelles ne veut pas dire accepter les stéréotypes. Il faut les dépasser et comprendre les particularités de chacun. Le stéréotype induit un phénomène de courbe en cloche. Un individu se situera plus ou moins dans la moyenne du type auquel il se rattache. Deux individus de types distincts peuvent très bien sur certains points se rapprocher, comme s’éloigner. La zone de recoupement sera donc plus ou moins importante. Il sera nécessaire de l’apprécier au cas par cas.

En décrivant sa culture telle qu’on la voit, d’une part, et telle que la voit les autres, d’autre part, nous mettons en évidence les différences culturelles. En évitant les idées reçues, nous faisons ressortir les points positifs qui apportent des avantages, ainsi que les faiblesses à gérer.

 

 

Explorer la culture

 

L’objectif est de fournir un guide au lecteur, afin de comprendre la signification des caractéristiques particulières d’une culture. Ce travail est plus ou moins évident. Nous verrons qu’explorer une culture, c’est explorer un océan :

. en surface, les vagues comparables aux artifices, rituels, comportements,

. en-deçà, les moyennes profondeurs, qui sont à l’origine des vagues abritent les croyances

et valeurs,

. les eaux profondes, difficiles à atteindre, cachent les présupposés.

En quête de signification

De nombreuses définitions de la culture existent. Margaret Mead parle de "grilles communes de comportement", Lévi-Strauss ou Geertz définissent la culture comme un "système de significations et de compréhensions partagées". La signification de ces deux premières définitions ne semble pas totalement appropriée, car d’un côté, il y a ce que les personnes disent et expliquent et de l’autre côté, ce que leurs comportements laissent paraître. La culture est donc un code à transcrire. De plus, ce code change avec le temps. Les présupposés culturels évoluent avec les générations. Ces évolutions culturelles sont dues aux changements d’environnement qu’elles subissent dans le temps. On en vient alors à la définition de Ed Schein où les représentants d’une culture font face aux contraintes externes (comment survivre) en les intégrant (comment rester ensemble).

Cette définition de la culture convient parfaitement aux enjeux du monde des affaires que les managers doivent affronter. L’adaptation à l’environnement s’effectue à l’aide de stratégies de développement continuellement redéfinies dans le temps. L’intégration en interne de ces décisions stratégiques se fait par l’élaboration d’organisations et de politiques de ressources humaines adaptées. Nous sommes donc bien en présence d’un environnement commun à tous, donnant lieu à des décisions propres à chacun, en fonction de sa culture.

Dresser une cartographie

Pour découvrir les particularités d’une culture, on observe, on questionne, on étudie le terrain. Enfin, on construit un modèle. La compréhension d’une culture implique que ses représentants et les observateurs travaillent ensemble. Des théories seront ainsi construites, testées et améliorées au fur et à mesure des expériences. L’objectif étant au final de fournir une grille détaillant les particularités culturelles en terme d’artifices, de comportements, de valeurs et de croyances, de présupposés propres à chaque culture.

Artifices et comportements

Ce que nous percevons de prime abord, ce sont les artifices et comportements. Il s’agit d’éléments visibles comme les codes vestimentaires, les rites de salutations, l’architecture des lieux, l’aménagement des bureaux, ... Les comportements influencent également la nature des contrats. D’un côté, des contrats verbaux, de l’autre, des contrats écrits. En Europe, un litige se règle plutôt à l’amiable, chacun veillant à préserver sa réputation. Par contre, les Américains ont l’habitude de faire intervenir le service juridique, dès lors qu’un litige, même insignifiant, apparaît.

Croyances et valeurs

Les managers expliquent que les comportements résultent des croyances et valeurs. Les croyances correspondent à un état de fait, les choses sont ainsi. Les valeurs concernent l’idéal, comment les choses devraient être. Les croyances et les valeurs se retrouvent parmi les facteurs de succès d’une organisation. On parle à ce niveau de la qualité des produits, de leadership technologique, de parts de marché. On parle aussi du management qui est "l’art de faire réaliser les choses par les autres", comme l’a défini Peter Drucker. On trouve dans cette définition beaucoup de croyances et de valeurs chères à la culture anglosaxone. Sous un autre angle culturel, est-il si important que les choses soient faites ? Comment peut-on parler des autres comme un vulgaire facteur de production ? Les choses ne doivent-elles pas plutôt être faites "avec eux" au lieu de "par eux" ?

On peut donc en déduire l’existance d’un lien étroit entre les qualités que doit détenir un manager et les croyances et valeurs propres à la culture dans laquelle il exerce ce rôle.

Présupposés

Comparés aux eaux profondes, les présupposés qui se situent à la base des croyances et des valeurs sont définis comme des dimensions. Ces dernières résultent de travaux d’anthropologues, notamment Kluckholn et Strodtbeck. Les dimensions nous permettent d’organiser et de synthétiser notre compréhension de la culture telle qu’elle est précédemment définie : résoudre des problèmes d’adaptation externe et d’intégration interne.

Les dimensions culturelles

On entend par adaptations externes les relations avec la nature, les activités humaines, la vérité et la réalité. L’intégration interne traite les problèmes de nature humaine, les relations entre les personnes, la hiérarchie, l’opposition masculin/féminin et individualisme/collectivisme.

L’espace, le temps, le langage relient les dimensions externes et internes. Le language permet de décrire l’environnement (relation avec la nature) et permet aux personnes de communiquer (relation entre les personnes). Les personnes marquent leur distance et aménagent l’espace différemment. Enfin, le temps est vu par les Anglo-saxons comme séquentiel, comme une suite d’opérations distinctes, le futur étant indépendant du passé, alors que les Latins et les Asiatiques le verront comme une continuité de faits, avec un lien entre passé, présent et futur.

Les cultures types

Les liaisons entre les présupposées donnent donc naissance à une typologie des cultures. D’un côté ce qu’André Laurent appelle la Culture bleue (contrôle de la nature, quantification, individualisme, tournée vers l’avenir) et de l’autre, la Culture verte (fatalisme, ressenti, collectivisme, importance accordée au passé). Entre ces deux extrémités, un continuum de types culturels donnant lieu à la richesse et la complexité des situations et des relations multi-culturelles que nous connaissons.

 

 

Interactions de sphères culturelles

 

Le jeu de la culture dans le milieu des affaires peut être représenté par des ensembles, appelés sphères culturelles d’influence. Elles intéragissent de manière complexe. La résolution des problèmes d’ordre culturel devient donc très vite délicate. Par exemple, dans un même pays, des entreprises de secteurs d’activité différents doivent être approchées de manières différentes. Par contre, un service d’ingénierie français à Paris aura plus de points communs en terme de culture avec un service d’ingénierie japonais de Tokyo qu’avec un service comptable français situé à Marseille. Le principal est de cerner quelles sont les variables culturelles critiques et de mesurer leurs incidences et conséquences sur l’organisation de l’entreprise. Cette étape est essentielle dans les entreprises internationales (JV, acquisitions étrangères, ...) au sein desquelles les managers ont à coopérer. Chaque sphère a ses propres artifices et comportements, croyances et valeurs, présupposés. Chacune a ses propres réflexes vis-à-vis des contraintes externes et ses propres façons de les gérer en interne.

Sphères culturelles d’influence :

La culture régionale dans les limites du territoire national se caractérise par son histoire, sa politique, son économie, sa religion, son origine rurale ou citadine. Au-delà des frontières nationales, il existe parfois des influences régionales. C’est le cas de la région couvrant Stuttgart, la Suisse allemande et l’Alsace où les coutumes sont communes, puisqu’une seule tribue, celle des Alamanns, les relient à l’origine.

La culture sectorielle a des différences très marquées. Les comparaisons les plus contrastées pourraient être le monde de la Publicité et la Banque, le BTP et le Consulting, les détaillants et la Pharmacie. Les oppositions se situent aussi bien au niveau des processus de décision, de la nature des marchés et des produits et de leur règlementation, que du niveau de développement technologique et de la nature des avantages concurrentiels (capital, main-d’œuvre, créativité, ...).

La culture du métier est de plus en plus influente, du fait que les entreprises recherchent du personnel de plus en plus qualifié, expert dans son domaine. Les réactions de ce personnel sont très liées à la culture de la profession qui peuvent être très différentes les unes des autres. Pour illustrer ce point, on opposera un ingénieur et un commercial, un infographiste et un comptable, ...

La culture fonctionnelle : chaque fonction de l’entreprise voit les choses différemment. Le marketing, le commercial et les achats sont plus tournés vers l’environnement externe. La production est plus concernée par le court terme (l’opérationnel), alors que les financiers en charge des investissements travaillent sur un horizon plus à moyen terme, voire à long terme. Les ouvriers sont plutôt concernés par leur niveau de rémunération, alors que le département R&D est plus sensible à la reconnaissance que confère la découverte d’une innovation technologique.

La culture d’entreprise dépend avant tout de la nature du fondateur, du charisme de son patron, de son stade de développement.

L’avantage concurrentiel tiré de l’interaction des sphères

En résumé, l’avantage concurrentiel provient en partie de l’interaction des sphères. Certaines sphères pouvant interagir de manière négative. L’organisation doit détecter les sphères culturelles d’influence déterminantes de façon à anticiper et repousser le point de rupture. L’organisation doit éviter les menaces culturelles, afin de bénéficier avant tout d’opportunités en terme de compétitivité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2e Partie

Culture et pratiques managériales

 

 

 

 

 

 

 

Culture et organisation

 

Comment la culture influence-t-elle la structure de l’organisation et ses processus ? Pour répondre à cette question, l’étude des particularités est conduite au niveau national. Ensuite, la possibilité de reproduire une organisation au-delà des frontières sera envisagée. Enfin, sera abordée la logigue des meilleures pratiques.

Courants de pensée managériale et importance de la culture

Les managers s’accordent à dire que la culture nationale influence les relations inter-personnelles. Par contre, l’ensemble des managers est moins convaincu que la culture impacte également l’organisation dans sa structure, son système de décision, ses processus. Pour bon nombre de managers, le type d’organisation est avant tout fonction de la taille et des technologies du métier. D’autres courants de pensée managériale défendent l’idée que le contexte social national influence la structure des organisations. Certains de ces courants sont plus "structuralistes" (la structure crée la culture), d’autres sont "culturalistes" (la culture crée la structure). Dans les faits, on constate que les techniques managériales actuelles (management de la performance, management participatif, ...) sont le résultat d’héritages historiques et sociaux. Selon les présupposés culturels, il existe un modèle "relations humaines" qui met l’accent sur les rapports entre les salariés et les niveaux hiérarchiques. Parallèlement, le management scientifique focalise sur l’accomplissement de la tâche de manière optimale, en faisant abstraction de la dimension humaine. Les théoriciens expliquent

que la combinaisons des facteurs institutionnels (nature du marché, système éducatif, relation entre le milieu des affaires et l’Etat) a fait que ces modèles, relations humaines ou management scientifique, ont pris place dans différents pays, chacun à leur rythme et dans des proportions différentes.

Culture et structure

L’impact de la culture sur la structure et le management a été étudié longuement par Geert Hofstede. Entre la fin des années 60 et les années 80, Hofstede a mené une enquête d’opinion en s’intéressant à 116.000 salariés d’IBM à travers 40 pays. Il identifia quatre dimensions. Il s’agit de la distance hiérarchique, du contrôle de l’incertitude (prévision et stabilité), de l’équilibre entre individualisme et collectivisme (s’occuper de soi-même et s’occuper de la collectivité), ainsi que du rapport masculin/féminin (assurance, concurrence, matérialisme, mère nourricière, qualité de vie, relationnel). Hofstede en conclut que selon la position des salariés sur chacune de ces quatre dimensions, il était possible de définir des types de management et d’organisation.

Culture et processus

La corrélation entre culture et structure organisationnelle se retrouve dans les processus.

Une politique de formalisation et standardisation des procédures est le reflet d’une faible tolérance de l’incertitude. Par opposition, les procédures et descriptifs de travail sont moins formalisés au sein des organisations fondées sur la communication.

Le système de contrôle est aussi l’image des présupposés culturels concernant les relations entre les personnes (pouvoir) et les relations avec la nature (incertitude). La culture influence également le type de contrôle. Les Français recruteront un manager sénior issu d’une Grande Ecole (contrôle des "inputs"), les Allemands se moquent des élites et préfèrent que les choses soient faites avec rigueur (contrôle "throughout") et les Anglais ou les Américains se focaliseront sur les budgets, le contrôle financier, le reporting (contrôle des "outputs"). Enfin, la planification est aussi fonction de la culture. Les Anglais visent le long terme, les Allemands l’opérationnel et les Français le court et moyen terme avec moins de participation à son élaboration.

L’information que véhicule l’organisation pour décider, communiquer, coordonner, circule différemment selon la culture. Les managers français font circuler l’information par leurs relations personnelles, c’est une forme de pouvoir. La communication informelle représente une importance considérable au sein des entreprises françaises. Comparativement, les managers suédois ne prêtent que peut d’attention à la structure et à la hiérarchie. Les maillages des réseaux d’information sont tout aussi informels, mais surtout plus ouverts que chez les Français. Les Suédois insistent sur la transparence et le partage de l’information. Dans les entreprises japonaises, les conversations précises sur des sujets variées sont très encouragées à tous les niveaux et tant en interne qu’avec des interlocuteurs extérieurs à l’organisation. Cet échange d’information sans frontière crée une "entreprise apprenante". On note que l’aménagement des bureaux, l’architecture des locaux et les technologies de l’information permettent aux managers de partager l’information, mais aussi de la filtrer. La JV Toshiba-Siemens s’est réalisée avec des Japonais prêts à partager l’information et donc

à aménager leur lieu de travail en conséquence, et des Allemands préférant conserver une certaine intimité, avec des bureaux moins ouverts. En résumé, l’espace physique et les maillages d’interactions sont des artifices culturels qui trouvent leur origine dans différentes croyances en terme de hiérarchie, formalisation et participation.

Enfin, la prise de décision trouve aussi ses racines dans la culture. Qui prend les décisions ? Qui est impliqué dans ce processus ? Où les décisions sont-elles prises ? En Suède et en Allemagne, où le pouvoir et la hiérarchie ont une importance moindre, il y a plus de concertation dans la prise de décision. En France, le gouvernement joue un rôle important dans la détermination des politiques et des stratégies des grandes entreprises. En terme de temps de décision, les managers européens et américains se plaignent de la lenteur avec laquelle les entreprises japonaises décident. Les Japonais à leur tour se plaignent du temps que mettent Européens et Américains pour mettre en œuvre leurs décisions. La raison est simple. Les Européens et les Américains prennent des décisions rapides, mais individuelles, et qui restent donc "à vendre", chose difficile quelquefois. Les Japonais, eux, prennent leur décision de manière collective, elle sont donc déjà "vendues".

Transfert des meilleurs pratiques

Parmi les solutions précédentes, il y a une forte volonté de transférer les meilleures pratiques nationales au-delà des frontières. Les cercles de qualité japonais peuvent-ils être tranférés dans des pays individualistes comme les USA ou la France ? Le management matriciel viole le principe de décision individuel, cher au Français. Le management matriciel frustre les Allemands, à cause du manque de clarté dans sa structure. Le point est que différentes logiques organisationnelles existent dans différents pays, avec leurs contextes sociétaux propres, et elles donnent des résultats équivalents. Ces résultats sont biens supérieurs à ceux qu’offriraient des logiques organisationnelles identiques implantées au sein d’environnements culturels différents. Le transfert de structures et processus managériaux implique d’identifier au préalable leurs présupposés culturels communs.

 

 

Culture et stratégie

 

Comme nous l’avons vu précédemment, la culture est une question d’adaptation externe et d’intégration interne. Concernant la stratégie, elle nécessite des décisions pour s’adapter vis-à-vis de son environnement externe et des changements de configuration des ressources internes. On remarque le lien étroit entre culture et stratégie, du fait de leur logique commune.

Origines culturelles de la stratégie

Le management stratégique utilise plusieurs modèles (SWOT, matrice BCG, ...) fondé sur des croyances et valeurs. L’approche analytique et rationnelle de ces modèles part du principe que, perçu et analysé de manière similaire par tous les managers, l’environnement et l’organisation forment une réalité objective. Très souvent, ces mêmes managers se trouvent confrontés à un environnement incertain, à des problèmes de structure ou de changement socio-politique. La

raison est que la réalité est subjective. Chaque manager a sa propre vision des choses et prend ses décisions en conséquence. De plus, cet environnement prévisible et intelligible, cette vision fonctionnaliste et instrumentaliste du monde, est remise en question dans d’autres cultures.

Par exemple, les principes islamiques de stratégie émanent de présupposés culturels radicalement différents des présupposés occidentaux. En Islam, les émotions ressenties sont mise en avant, il ne s’agit pas que d’une analyse rationnelle. Un autre exemple, "l’Art du management japonais" montre que les entreprises japonaises ont une autre approche de la stratégie. Elles expliquent que l’analyse rationnelle occidentale est trop "myope" et "simpliste". Ce qui donne une fausse image de la réalité.

Certains chercheurs occidentaux comme Mintzberg ont plutôt critiqué la planification stratégique. Explicant que la stratégie évolue de manière continue, graduellement ou de façon spontanée, elle est le fruit d’une action collective et non de décisions isolées. Plus récemment, le management stratégique a montré un fort intérêt à développer des compétences et des ressources organisationnelles. Ces ressources disponibles et ces compétences acquises signifient que l’entreprise entretient une capacité et une flexibilité en vue de répondre aux événements externes ("être" au lieu d’ "agir" au niveau de l’entreprise, ou encore les "bonnes attittudes" au lieu des "bons actions"). Organisées sur ce principe, les entreprises japonaises ont développées des compétences qui leur ont permis de créer ou re-créer des marchés. L’exemple est illustré par Honda qui s’est lancé à la conquête du marché américain de la moto, dont les clients étaient jusque là des voyous en blousons noirs chevauchant des "gros cubes". Honda a créé un nouveau marché en s’adressant aux lycéens, employés de bureaux, cadres, avec des motos de plus petite cylindrée en s’adressant aux "gens les plus sympathiques". En résumé, la stratégie peut être observée de plus ou moins loin et avec plusieurs optiques.

Modèles stratégiques culturels

On en vient donc à dire qu’il existe des modèles stratégiques culturels. Les présupposés culturels ont une incidence sur les adaptations aux contraintes externes, l’organisation est plus en harmonie avec son environnement, ainsi que sur l’intégration interne en terme de ressources sollicitées (Qui participe aux décisions ? Qui décide ?). Dans la pratique, les managers des pays nordiques et anglo-saxons croient que l’environnement n’est pas si incertain et qu’il peut être analysé et maîtrisé. Ailleurs, les Latins et Asiatiques perçoivent une incertitude plus forte et moins de contrôle sur les événements futurs. On en déduit que différents présupposés mènent à différents modèles de management stratégique qui peuvent être caractérisés comme controlling, d’une part et adaptating, de l’autre.

Le modèle controlling est centralisé et formalisé, l’information provient des rapports d’activité, du secteur économique, des consultants, elle est souvent quantitative et objective. Les présupposés culturels font que l’environnement est prévisible. La direction prend les décisions qui sont des événements distincts.

Le modèle adaptating, lui, est décentralisé, moins formel. Au lieu de décisions stratégiques, il s’agit d’orientations stratégiques. Les décisions sont prises localement au fil de l’eau, tout en respectant la "stratégie cadre". Les présupposés culturels font que l’environnement ne peut être connu et maîtrisé.

Influences externes aux modèles stratégiques

Il est d’autant plus difficile de connaître et maîtriser l’avenir que d’autres facteurs que ceux purement culturels influencent également la stratégie d’entreprise. Par conséquent, il y a interaction entre variables culturelles et contexte politique national, l’environnement institutionnel qui prend en compte le rôle du gouvernement et des syndicats. Ceux-ci affectent la vision à court, moyen et long termes que peuvent avoir les entreprises. Les accords internationaux (U.E. et N.A.F.T.A.) interagissent tout autant sur les cultures locales.

En d’autres termes, une volonté de contrôle des évènements extérieurs accompagnée d’une organisation centralisée et formalisée résultent d’une attitude défensive et interprètent les problèmes stratégiques comme des menaces. Par opposition, une volonté de s’adapter, doublée d’une organisation décentralisée et moins formalisée permettra d’attaquer et surtout de voir les problèmes d’ordre stratégique, comme des opportunités. La culture d’entreprise et la règlementation (ou dérèglementation) nationale incitent les entreprises à s’adapter aux marchés changeants et voire plus concurrenciels dans le cas de dérèglementation. La culture métier est également affectée par les décisions internationales, comme la dérèglementation européenne concernant la banque, les télécoms, le transport.

Influences culturelles sur la stratégie

Souvent, il y a source d’incompréhension entre le siège d’une multinationale et les filiales réparties dans différents pays. Le siège veut réduire les dépenses de R&D, alors que les filiales ont une vision à long terme. Les filiales veulent s’adapter aux nouveaux marchés et saisir les opportunités, mais le siège renforce le contrôle et la centralisation des décisions. Comprendre ces différences donne l’avantage face aux concurrents internationaux. Connaître les principales dimensions culturelles aide à anticiper la réaction d’un concurent face à un événement d’ordre stratégique, comme une nouvelle règlementation ou une opportunité qu’offre le marché. De même dans les JV, ces différentes interprétations des problèmes stratégiques peuvent entrainer des incompréhensions. L’intérêt porté au management multiculturel fait souvent suite à des difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de stratégies globales ou de changements stratégiques dans un pays en particulier.

 

 

Culture et Management des Ressources Humaines

 

Toute entreprise internationale qui souhaite mettre en œuvre une stratégie globale doit définir sa politique de RH en conséquence. Malheureusement, la même stratégie ne donne pas des résultats identiques dans des contextes culturels différents.

La dimension culturelle du MRH

Selon que l’organisation fonctionne sur un système de tâche et non de relations entre individus, s’intéresse à l’individu au lieu de la communauté, et privilégie les actions aux attitudes, les présupposés culturels diffèrent. Aux Etats-Unis, où la vision est instrumentale, où l’être humain est regardé individuellement, les RH ont pour origine la psychologie. Cela implique que les salariés ont besoin d’un système de récompense, d’un travail enrichissant, la relation employeur-salarié est considérée comme "contractuelle", fondée sur la réciprocité des obligations. Par contre en Europe, la vision est sociale, on regarde la communauté dans son ensemble, c’est-à-dire le système social, la relation entre partenaires sociaux. Dans ce cas les RH ont pour origine la sociologie. Par conséquent, connaissant ces différences relationnelles entre employeur et salarié, selon les cultures, le service RH doit définir une politique appropriée entre le siège et les filiales dans chaque pays.

Pour un MRH multiculturel efficace

Cette personnalisation doit s’effectuer à chaque étape du processus. Dès le recrutement, et par la suite aux étapes d’intégration, de formation, de développement personnel, d’appréciation et de rétribution, ainsi que d’évolution au sein du groupe. Certaines de ces étapes peuvent être traitées globalement, d’autres devront s’adapter aux besoins locaux. Il faut cependant rester attentif, car il est toujours difficile d’analyser la cause des résistances locales. Sont-elles dues aux différences culturelles, à la volonté d’une autonomie locale ou au fait que le management du siège est trop dirigiste ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

3e Partie

Manager les différences culturelles

 

 

 

 

 

 

 

Le Manager "International"

 

Auparavant, les managers internationaux étaient des expatriés. Leur mobilité n’était pas toujours synonyme de capacité à penser de manière internationale. Aujourd’hui, la plupart des échanges d’information se font par fax, méls, visioconférences avec des entreprises étrangères. La sensibilité culturelle est désormais nécessaire à tous les échelons de l’organisation. Les entreprises définissent des stratégies internationales qui imposent un management à "vocation" internationale. Les entreprises ont moins besoin de se focaliser sur Qui est un manager international ? mais plutôt de se concentrer sur Quelles sont les tâches internationales que doivent effectuer les employés ?

Les phases d’adaptation aux cultures étrangères

Effectivement, le management des différences culturelles au niveau de l’individu venaient jusqu’à présent des "expats". Leur taux d’échec aurait atteint 30%, ce qui représente un coût non négligeable pour chaque entreprise. L’étape critique pour les managers qui travaillent à l’étranger se situe au moment où ils réalisent que la différence culturelle vient aussi d’eux-mêmes. Heureusement, il existe un processus d’ajustement culturel, une courbe en "U" comportant une première phase d’optimisme, une deuxième de frustation et confusion, et enfin un ajustement progressif s’effectue par rapport au nouvel environnement. Malheureusement, de retour à la "maison", les personnes ayant séjournée à l’étranger, doivent passer par ces trois phases à nouveau, avant de se ré-acclimater.

Les compétences des managers internationaux

Ce qui fait le succès des managers internationaux, ce sont des aptitudes supplémentaires à celles requises pour animer et gérer une équipe à un niveau local. Une bonne dose de facultés relationelles est nécessaire, ainsi que d’habilité linguistique, de motivation pour vivre à l’étranger. En plus, il faut accepter les incertitudes et les ambiguités, faire preuve de flexibilité, de patience et de respect, avoir une grande maîtrise de soi. Le sens de l’humour aussi est utile ! Aussi bizarre que cela puisse paraître, il permet de s’intégrer par le biais des jeux de mots et de blagues locaux, ainsi que de récupérer de manière positive, par la dérision, une éventuelle incompréhension d’ordre culturel.

Développement des compétences culturelles

L’acquisition et le développement de ces compétences culturelles s’effectuent par divers biais.

Certains ont eu la chance d’avoir des parents déménageant fréquemment d’un pays à l’autre et ceci les aide, dès l’enfance, à s’adapter aux différentes cultures. Autrement, des cursus d’enseignement supérieur, comme l’INSEAD, privilégient la mixité internationale. On pourrait presque dire que le contenu des cours est secondaire, comparé à la priorité donnée au travail entre personnes d’origines culturelles différentes. Enfin, l’expérience professionnelle est nécessaire. Pour cela, certaines entreprises comme Schlumberger, envoient leurs jeunes recrues fraichement diplomées à l’étranger, afin de s’accoûtumer aux différences culturelles, au plus vite.

A titre individuel, il est nécessaire d’adopter quelques règles de base pour éviter des débuts difficiles. D’abord, laissez de côté votre "processus de négociation". Surtout quand votre interlocuteur est plus familiarisé à votre culture que vous ne l’êtes à la sienne. Epousez les habitudes culturelles de l’autre pour faire les choses. Ces deux techniques peuvent être utilisées alternativement par chacun des intervenants. Lorsque des managers ont souvent voyagé et travaillé à l’étranger dans des milieux culturels différents, il devient alors difficile d’appréhender leurs comportements.

Evolution permanente des interactions multiculturelles

Créer un profil culturel de l’autre signifie intégrer les dimensions professionnelle, sociale, fonctionnelle, métier, ... Ce sont beaucoup de variables qui interagissent entre elles, ça ne peut donc être qu’un point de départ ! D’autant plus que les intéractions culturelles ne sont pas statiques, elles évoluent dans le temps et doivent être étudiées comme des processus dynamiques continus.

Veiller à conserver ses qualités individuelles

Les interactions multiculturelles imposent d’apprendre de nouvelles organisations, de nouveaux schémas de pensée, de nouveaux comportements. Ceci est d’autant plus difficile qu’il ne faut pas pour autant oublier ses propres valeurs, ses qualités, celles qui font "avancer" chacun d’entre nous.

L’Equipe Multiculturelle

 

Aujourd’hui, du fait d’un environnement complexe et dynamique, les entreprises sont organisées en petits groupes mobiles, rapides et flexibles : les équipes. Ce découpage en équipe est la solution aux problèmes d’adaptation externe. Les équipes collaborent et se coordonnent, dans le cadre de l’intégration des contraintes de l’environnement externe. Ceci est d’autant plus difficile que les membres des équipes ont des présupposés culturels différents. Trouver des solutions aux problèmes d’intégration interne demande un équilibre entre efforts individuels et efforts collectifs. Le concept d’équipe a pour origine les cercles de qualité du management japonais et a été développé et promu par la culture très individualiste, qu’est celle de l’Amérique. Dans d’autres pays, comme ceux de l’ancienne Europe de l’Est, où les initiatives personnelles sont prisées, le management par les équipes est vu comme démodé. Quoiqu’il en soit, ce type de structures est partout présent et afin qu’il soit efficace dans un contexte international, les équipes ont besoin de développer des stratégies culturelles appropriées. De plus, avec le temps, les équipes partagent leurs comportements, valeurs, croyances et présupposés culturels et elles en viennent à créer leur propre culture.

Le pourquoi des équipes multiculturelles

Une raison supplémentaire de constituer des équipes multiculturelles est d’augmenter la qualité des décisions prises. C’est pourquoi, les groupes de projet, taskforces, comités de pilotage, commissions sont composées de personnes de l’entreprise, ainsi que de clients, fournisseurs, partenaires de nationalités et cultures différentes. Mais, ces représentants d’origines distinctes doivent d’abord apprendre à travailler ensemble.

Elaborer une méthodologie de travail commune

Définir une manière commune de traiter un sujet passe par la création de contenu, la structuration des opérations (rôle de chacun, répartition des responsabilités, ...) et l’élaboration d’un processus de décision. Ce dernier élément, le processus de décision, est primordial, car sans moyens de communication, sans l’animation et la participation de tous les membres, sans la résolution des conflits, ni l’évaluation des performances, l’équipe ne produira pas les résultats attendus.

Mettre à profit les différences culturelles

On en vient donc à dire qu’aujourd’hui les équipes multiculturelles sont un état de fait. Au lieu de chercher à savoir si les équipes multiculturelles sont meilleures que celles constituées d’une seule culture, trouvons plutôt la manière d’intégrer des personnes de cultures différentes, d’accepter leurs différences et d’ajuster leurs zones d’interactions. Tout le monde s’accorde donc à dire que gérer des différences culturelles est une tâche à haut risque. Les particularités doivent être identifiées et discutées, au lieu de s’en accomoder ou de les ignorer. Le but n’est pas de neutraliser les différences, mais de s’en servir de manière constructive.

 

L’Organisation Globale

 

Au vu de ce qui précède nous comprenons que les organisations gèrent différemment leurs différences culturelles. Certaines les ignorent ou les minimisent, d’autres les utilisent. Ces manières de traiter les particularités culturelles se retrouvent au niveau des multinationales. Le siège entretient différents types de relations avec ses filiales. Dans certains cas la politique et les procédures viennent du siège, c’est-à-dire d’en haut, il s’agit d’une relation ethnocentrique. Lorsque le siège décide de "ce qu’il faut faire" et les filiales décident de "comment le faire", on parle de "polycentrisme". Dans le dernier cas, "quoi" et "comment" sont développés dans le cadre d’un travail conjoint entre le siège et les filiales, même mieux, avec chacune d’elles. Cette relation est géocentrique.

Unicité culturelle

Dans le cas d’une relation ethnocentrique, la règle est simple, les affaires sont les affaires. Les financiers, les managers et les ingénieurs sont tous identiques à travers le monde. Les politiques et pratiques développées au niveau mondial sont facilement transférables. MacDonald’s, Disney and IBM en sont les meilleurs exemples. Néanmoins, on s’aperçoit que de plus en plus MacDonald’s a tendance à adapter ses plats au goût et à la demande locale. On en vient à dire que le schéma de pensée one best way a ses limites. Par conséquent, il est nécessaire de peaufiner l’optimisation par une personnalisation locale.

Minimiser les différences culturelles

Au vu de ces adaptations, les entreprises s’aperçoivent que le fait de ne pas tenir compte des différences culturelles peut coûter cher. Une approche différente des particularités culturelles se met donc en place. Pour certaines organisations, ces différences existent, il faut leur prêter attention. Elles sont la principale source de problème et une menace affectant l’efficacité. On peut y remédier en créant une culture groupe, un melting-pot. Le Suédois ABB est le meilleur exemple de culture unique. L’anglais est la langue pour tous, un système d’information relie les 1300 filiales, une charte des procédures est commune à tous, enfin une culture unique diffusée par un PDG charismatique. Comme autre exemple, les Japonais qui minimisent les influences locales en envoyant des managers nippons inculquer leurs schémas de pensée aux collaborateurs locaux.

Une des pratiques polycentriques est d’isoler les cultures les unes des autres. On évite alors les interactions. En clair, la société mère détermine les objectifs, les filiales sont libres de choisir les moyens à mettre en œuvre. Très souvent, le point commun aux filiales est le système d’information faisant remonter les informations nécessaires vers la maison mère pour consolidation. Royal Dutch Shell, Matsushita et d’autres ont adopté ce schéma.

Gérer de manière globale

Dans le cas de relations géocentriques, les multinationales ont compris qu’il était préférable de mettre à profit les différences culturelles. Un moyen est d’améliorer l’intégration des filiales internationales par le développement de marchés globaux et des gammes de produits également globales. Avec un reporting matriciel, les responsables produits internationaux coopèrent avec les responsables de marché locaux. Quoiqu’il en soit, les managers locaux ne peuvent pas être efficaces, si on ne leur fournit pas un outil de communication commun par le biais d’une formation sur le thème de la culture. La coopération transfrontalière peut aussi être encouragée par un mécanisme incitant à construire des interdépendances. On tire alors un meilleur profit des compétences et connaissances locales. On comprend que capitaliser sur les différences culturelles demande de trouver un juste équilibre entre besoins locaux et contrôle central.

La création de valeur ajoutée résulte également de la coordination des fonctions, des produits et des centres de profit entre pays détenant respectivement les meilleurs ressources disponibles. On en vient à rencontrer des entreprises qui effectuent le développement de logiciels à Bengalore en Inde et d’autres le stylisme des montres en Italie et leur fabrication en Suisse.

Enfin, il y a la coopération technologique entre l’industrie et l’université. C’est le cas en France ou au Danemark.

Naît alors un nouveau modèle de multinationales au sein duquel les départements spécialisés sont coordonnés grâce à une structure en réseau. Au lieu de départements partiellement indépendants rapportant chacun au siège, la multinationale devient une "hétérarchie" constituée de plusieurs centres de décision jouant chacun leur rôle dans la formulation et la mise en œuvre de la stratégie groupe commune à tous.

Pas aussi global qu’on ne le pense !

Lorsqu’on regarde de plus près ces organisations, on s’aperçoit qu’elles ne sont pas, même pour celles qui tirent le mieux profit des particularités culturelles, tant internationales que cela. Il ne suffit pas d’avoir ses produits présents sur l’ensemble des marchés du globe pour avoir une stratégie globale. Un état d’esprit "global" est également nécessaire. Il se définit comme la capacité à apprécier les croyances, valeurs, comportements et pratiques commerciales des individus et des organisations entre les différentes régions et cultures. Est-ce qu’une entreprise peut réellement être reconnue comme "globale", si ses 200 plus importants cadres sont tous Français, Japonais ou Américains ?

Créer des alliances globales stratégiques

Il se pourrait donc que le meilleur modèle pour manager la diversité soit parmi les alliances stratégiques et les joint-ventures. Etant donné les intérêts compétitifs au niveau national et mondial, les entreprises doivent davantage opérer comme des fédérations. Ce schéma permet à chacune de conserver sa supprématie nationale, tout en accomplissant des opérations difficiles et lourdes en investissement, grâce aux alliances.

En résumé, le défi consiste à trouver des moyens de capitaliser sur la diversité, d’utiliser au mieux les différences culturelles, pour générer des avantages concurrentiels.

Citoyen du monde :

éthique des affaires et responsabilité sociétale

 

A quel point l’éthique des affaires et la responsabilité sociétale sont-elles liées à la culture ? Quel rôle ont les dirigeants et les entreprises en tant que citoyens du monde "global" ? Les réponses à ces deux questions permettront d’appréhender les relations d’affaires multiculturelles de manière plus appropriée que ce qui s’est pratiqué à ce jour.

Ethique des affaires

L’intérêt actuel pour l’éthique des affaires représente, pour David Vogel, "un dialogue moral émergeant ayant des origines religieuses séculaires" concernant la nature des marchés et la nature humaine. Pour l’église catholique, le profit était sanctionné et revenait à la communauté, médiatrice dans la relation entre les individus et Dieu. Pour les Protestants, l’accès à Dieu est plus direct. La Rédemption est possible par le travail.

Pourquoi les firmes existent-elles ?

La raison pour laquelle la firme existe est fortement influencée par la culture. Pour certains, fondée sur la maximisation du bénéfice au profit des actionnaires et la réduction des coûts de transactions, les organisations sont des instruments dont les managers sont des acteurs économiques rationnels, guidés par l’individualisme. Pour d’autres, l’idée que la firme existe dans le but de promouvoir le bien-être au sein de la société (responsabilité sociétale) suppose que l’organisation soit un système relationnel, au sein duquel les managers sont guidés par le collectivisme (plusieurs stakeholders).

Raison économique versus raison morale

Est-ce tout simplement la philanthropie qui guide les entreprises à intégrer les valeurs éthiques ? ou plutôt, ces entreprises investissent-elles dans l’éthique pour en tirer un profit ? La question vaut la peine d’être posée lorsqu’on sait que l’intérêt d’investir dans les entreprises éthiques ou les fonds éthiques ne cessent d’augmenter. De plus en plus, les économistes dénoncent les fonds éthiques. Artifices marketing trompant les détenteurs en leur faisant croire qu’elles agissent avec moralité. Par ailleurs, l’Harvard Business School enseigne que l’éthique paye et qu’il est intelligent d’en respecter les règles. On en conclut donc que la motivation des entreprises reste bien le profit.

Il y a toutefois d’autres motivations, notament celles d’ordre culturel. Pour les Asiatiques et particulièrement les Néo-Confucianistes, l’autorité du gouvernement est essentielle, car la prospérité demande de la discipline dans les pays en voie de développement. La démocratie à l’occidentale mène au chaos. Les droits de l’individu doivent être respectés sans pour autant affecter les droits suprêmes de la communauté.

Mondialisation et facteurs de succès

Pour différentes raisons, le comportement éthique devient un facteur de succès dans le cadre de la mondialisation. Cet impératif de respecter les règles éthiques a pour cause principale l’arrestation, dans leurs propres pays, de plusieurs dirigeants faisant les frais du jeu international. Eviter la corruption, le travail des enfants, la protection de l’environnement semble difficile, car sans prise de risque, il n’y a pas de gains possibles d’une part et d’autre part, la définition de l’éthique n’est pas aussi semblable entre les cultures qu’on veut bien le croire. Certains principes éthiques sont universels : honnêté, intégrité, sauvegarde de la société, ..., d’autres principes restent propres à chaque culture : réciprocité, maximisation des bénéfices, aides sociales, protection des brevets, ... Bien que la mondialisation ait fait évoluer les manières de faire des affaires à travers le monde, plusieurs pratiques qui paraissent réprimables pour les Occidentaux restent bien encrées dans les pays d’acceuil. Il faut soit imposer la règlementation du pays d’origine ou pratiquer le jeu des usages locaux. On remarque que déjà, la plupart des entreprises visent les enjeux internationaux futurs et préfèrent anticiper les règles en choisissant d’adopter la règlementation de leur pays d’origine. Cet également ce qu’apprennent les étudiants en MBA à Harvard. Afin de garantir la performance, il faut faire ses objectifs quantitafifs, mais surtout être loyal, conserver un esprit d’équipe, ne pas oublier la loi et investir suffisamment dans le comportement éthique. Il existe alors plusieurs types d’entreprises selon leur degré de développement moral. On rencontre d’abord l’organisatoin amorale qui est conduite par le "Nous ne seront pas pris !". Suivi de l’organisation légaliste qui a le souci de performance économique, mais respecte la loi à la lettre. Ensuite, arrivent les entreprises responsables avec un souci grandissant de maintenir l’équilibre entre bénéfice et éthique, pour les stakeholders. Certaines encouragent les personnes à faire la "bonne" chose vont même jusqu’à intégrer les questions d’éthique dans leurs stratégies de développement.

Un code éthique suivi par tous

Dans le cadre de la mondialisation, les dirigeants doivent travailler ensemble. Et ce, de façon à créer un cadre de ce qui est éthique et de ce qu’il ne l’est pas dans chaque pays, afin de clarifier les différences et d’élaborer une base commune. Ensuite, des normes éthiques acceptés par tous pourront être retenues. L’Organisation des Nations Unies a créé un code éthique. Néanmoins, selon les cultures, ce code est suivi plus ou moins attentivement. On le remarque avec les Etats-Unis qui, en tant que pays à culture individualiste, étudient les répercutions qu’entraine ce code éthique sur son économie, avant de l’appliquer. Pour les pays plus collectivistes, ils regardent comment ce code est appliqué ailleurs pour le suivre eux-mêmes.

En conclusion, la mondialisation change les managers-soldats envoyés au champs de bataille pour remporter des victoires purement économiques, en citoyens du monde vivant du développement économique.

 

VI / Principale conclusion

 

L’ouvrage met bien en évidence l’une des difficultés majeures rencontrées lors des échanges internationaux : la relation interculturelle.

Par expérience personnelle, les différences culturelles au sein des activités professionnelles ne peuvent être niées, ni mêmes minimisées. Il est impératif de comprendre la culture de l’Autre, afin de rendre efficace la collaboration.

L’apprentissage des cultures et leurs incidences dans le monde des affaires est, pour ma part, un travail difficile qu’il est nécessaire de conduire sans relache. Le texte confirme bien les difficultés rencontrées par les expatriés et managers en relation avec l’étranger. Et ce, du fait des nombreuses imcompréhensions auxquelles chacun doit faire face.

Il est certain que la solution proposée par les auteurs qui consiste à construire sur les particularités de chaque culture semble à mes yeux la plus profitable. Cela passe par le développement de solides compétences managériales dans le domaine de la culture. Ce travail délicat sera récompensé à terme par la création de valeur, d’avantages concurrentiels et une prise en compte de l’éthique, comme l’explique le texte.

Le succès ne peut être garanti que s’il y a partage des valeurs de chacun et consensus sur chaque choix retenu. La qualité du manager international réside dans sa capacité à remettre en cause ses présupposés culturels.

Cette expérience paraît si enrichissante "humainement" que chacun ne peut être que tentée de la mettre en pratique.

 

 

 

VII / Actualité de la question

 

L’internationalisation du monde des affaires sera de plus en plus présente, tant en terme d’échanges que d’acquisitions et d’implantations commerciales à l’étranger. C’est pourquoi, les relations interculturelles sont d’actualité et le seront de manière croissante.

Au niveau de l’enseignement, comme nous l’avons vu dans le texte, l’INSEAD met l’accent sur les compétences multiculturelles des managers internationaux. L’ESCP, elle aussi, propose un module dans lequel le management multiculturel est traité.

D’un point de vu professionnel, des organismes de formation continue proposent des séminaires dont le point de départ est l’internationalisation de l’entreprise. Le contenu qui en découle traite tout particulièrement des difficultés liées au multiculturalisme des organisations et l’importance des qualités managériales à développer autour de ce sujet.

Par ailleurs, parmi les articles récemment parus dans la revue Business Digest, bon nombre d’entre eux concerne les relations interculturelles, le management multiculturel et les enjeux qui en découlent.