LES FICHES DE LECTURE  de la Chaire D.S.O.

Lionel ARSAC
CNAM – Chaire d'Organisation
Cycle C

 

Manuel CASTELLS

"Le pouvoir de l’identité"

(Volume 2 de la trilogie l’ère de l’information)

 

Sommaire :

 

 

Biographie

L’auteur est professeur de sociologie et de planification urbaine et régionale depuis 1979 à l’université de Californie à Berkeley. Il a enseigné pendant 10 ans à l’école des hautes études en sciences sociales à Paris. Docteur en lettre de l’université de Paris-V, il a publié 20 livres en plusieurs langues et a enseigné comme professeur invité dans une quinzaine d’universités en Europe, Amérique du Nord, Amérique latine, Asie.

La trilogie* qu’il consacre à l’ère de l’information est "le fruit de 25 années d’étude sur les mouvements sociaux et les dynamiques politiques dans diverses régions du monde. C’est le témoignage d’un goût obsessionnel pour le multiculturalisme".

* Volume 1 : La société en réseaux
Volume 2 : Le pouvoir de l’identité
Volume 3 : Fin de millénaire

 

Les postulats : Apparition de puissantes manifestations d’identités collectives

De puissantes manifestations d’identités collectives (des mouvements sociaux) apparaissent et prennent des formes diverses.

A partir de ce postulat, l’auteur construit son raisonnement sur la façon dont naissent ces mouvements sociaux, qui ils sont et quelles incidences ils ont sur la société contemporaine.

La mondialisation vu comme un monde nouveau

Le développement des technologies de l'information, la restructuration du capitalisme et la disparition de l'étatisme donnent naissance à une forme spécifique d’organisation, un monde nouveau  : la société en réseaux. Celle-ci se caractérise par :

Ce type d'organisation sociale se diffuse comme le capitalisme ou l'étatisme industriel l'ont fait en leur temps en secouant les instituions, bouleversant les cultures, créant de la richesse, rependant la pauvreté, stimulant la soif du gain, l'inventivité, l'espoir, infligeant de terribles épreuves et semant le désespoir.

L’identité organise le sens

Des mouvements sociaux naissent en réaction à la mondialisation. Ces mouvements sont définies par l’auteur comme des Actions collectives menées en vue d'un objectif, dont le résultat, en cas de succès comme en cas d’échec, transforme les valeurs et les institutions de la société. Leurs fondements sont basés sur l’identité.

  • Patriarcat et Etat-Nation en danger
  • La mondialisation, le développement de ces nouveaux mouvements sociaux et le recours systématique aux médias pour propager les idées de ces mêmes mouvements entraîne une grave crise de l’Etat Nation et du patriarcat.

    Cet ouvrage est donc consacré aux mouvements sociaux et à la politique tels qu’ils résultent de l’interaction entre la mondialisation (qu’impulse la technologie), le pouvoir de l’identité (sexuelle religieuse, nationale, ethnique, territoriale, sociobiologique) et l’Etat (avec ses institutions).

     

    l'identité source de sens

    L'identité des acteurs sociaux est un processus de construction du sens à partir d'un ou plusieurs d'attributs culturels. Elle se construit par personnalisation : elle est source de sens pour les acteurs eux-mêmes et par eux-mêmes. Le Par Qui et le Pour Quoi déterminent le contenu symbolique de l'identité culturelle construite et sa signification pour ceux qui s'identifient ou s'excluent.

    Ces nouveaux mouvements sociaux défient la mondialisation et le cosmopolitisme. Ils agissent au nom de la singularité culturelle et au nom du contrôle des individus sur leur vie et leur environnement.

     

    1) Des mouvements régressifs se barricadent pour résister au nom de Dieu, la Nation, l'Ethnie, La famille, le terroir...


    A. Les identités légitimantes s’engagent dans une suite d’adaptation sans fin

    "Elles sont introduites par les instituions dirigeantes afin d'étendre leur pouvoir et rationaliser leur domination sur les acteurs sociaux. Elles créent une société civile à savoir un ensemble d'organisations et institutions, plus une série d'acteurs sociaux structurés et organisés reproduisant l'identité qui rationalise les sources de la domination structurelle".

    Remise en cause des processus de construction d’identité et apparition de nouvelles formes de changement social.

    La société en réseaux est née d’une disjonction systémique local mondial, et d’une relation au pouvoir et à l’expérience vécue, elle-même située dans des espaces temps différents. Tout projet de vie réfléchi devient impossible sauf pour l’élite qui habite dans un espace intemporel des flux des réseaux mondiaux et des antennes locales qui en dépendent.

    Par conséquent, les acteurs sociaux exclus de l’individualisation de l’identité liée à la vie dans les réseaux mondiaux du pouvoir, de la richesse, ou qui n’en veulent pas, désarticulent et réduisent en peau de chagrin les sociétés civiles, issues des identités légitimantes.

    Ainsi, la quête du sens, passe par la reconstruction d’identités défensives autour de principe communautaire en se transformant en sujets innovants et en empruntant des chemins divers.

    Caractéristiques communes des identités défensives
    Ces identités naissent en réaction à 3 facteurs :

    "Plus le monde est vaste, et plus les acteurs sociaux cherchent à le rétrécir. Si les réseaux dissolvent le temps et l’espace, on s’ancre dans des lieux, on réveille la mémoire historique. Enfin, si le cadre patriarcal s’effondre, on proclame que la famille et la communauté ont 1 valeur transcendante car voulue par Dieu".

     

    B. Des identités résistances susceptibles de se transformer en identités projets

    "Elles apparaissent quand des acteurs sociaux se trouvent dévalorisés ou stigmatisés par la logique dominante. Ils utilisent comme construction du sens les communautés et se barricadent en utilisant des principes contraires ou étrangers à ceux des institutions de la société".

    Ces mouvements sociaux lancent un défi à la mondialisation en fonction de leurs racines sociales et culturelles. Au nom de leur identité, ils veulent défendre les intérêts de leur pays et de l’humanité. Ils mettent un terme au fantasme néolibéral qui veut utiliser l’architecture informatique pour créer une nouvelle économie mondiale indépendante de la société en concentrant l’information, la production et les marchés dans une fraction précieuse de la population en se débarrassant du reste sous diverses formes, plus ou moins humaines, selon le tempérament de chaque société. Cet état est en train de déclencher un grand refus.

    Ces mouvements sont plus réactifs et défensifs que porteur d’un projet de société. Ils doivent leur "succès" aux médias et à la technologie informatique. Le mécanisme est le suivant : on prend une initiative spectaculaire dans le but d’attirer l’attention générale sur les exigences du mouvement. Puis on réveille les masses manipulées par la propagande et soumises à la répression.

    Ces mouvements cherchent à faire pression sur les états et les institutions. Ils tentent de renverser le cours des événements qui est caractérisé par la soumission au nouvel ordre mondial. Les armes représentent un symbole de liberté et un moyen de déclencher l’événement qui attirera l’attention des médias. Ces mouvements ont une structure basée sur les nouvelles technologies de l’information (Internet, Fax..).

     

    2) Les identités projets : des rassemblements novateurs ayant pour ambition de révolutionner les relations humaines (Verts, Féministes)

    "Les acteurs sociaux construisent une nouvelle identité qui redéfinit leur position dans la société, et se proposent de transformer l'ensemble de la structure sociale. Les sujets (désir d'être d'un individu) sont l'acteur social collectif à travers lequel les individus accèdent à un sens holistique dans leur expérience. C'est un projet pour vivre autrement en instaurant une société post patriarcale. Les identités projet, si elles se développent, naissent de la résistance communautaire et non de la société civile".

    Les identités projets : l’exemple du mouvement environnementaliste

    La relation Economie, Nature, Société est à mettre au crédit du mouvement de défense de l’environnement dans la plupart des régions du monde depuis les années 60.

    L’environnementalisme prend des formes très diverses et c’est cette diversité, de théories et pratique qui en fait un mouvement nouveau, décentralisé multiforme, porté à s’organiser en réseaux et à se répandre partout.

    Les idées vertes sont nées au XIX siècles. Elles se sont développées avec l’apparition des NTIC et ont établie un lien fort et ambigu avec la science et la technologie. En effet, la modélisation biologique a contribué à la diffusion des idées d’un mouvement fondé sur la science, bien qu’il l’utilise aussi pour la combattre et défendre la vie. Il propose de rétablir un contrôle social sur les produits de l’esprit humain, avant que la science et la technologie ne se mettent à vivre par elles-mêmes et que les machines ne finissent par dicter leur loi en :

    Le mouvement environnementaliste est probablement l’acteur le plus capable de projeter une temporalité nouvelle, révolutionnaire. Son succès est effectif grâce à son appui sur les organisations de base et sur la médiation permanente des thèmes et valeurs humanistes de ce mouvement. Il fait également pression sur les états et les institutions internationales afin d’obtenir des lois, des décisions et leur application, voir même, comme en Europe, présente des candidats aux élections politique.

    Par ces diverses tactiques, l’environnementalisme est devenue une force majeure dans l’opinion publique. Il s’est institutionnalisé et tisse sa toile en intervenant dans les conseils d’administration des grandes firmes, les mairies, les parlements, Etc…

    Le mouvement a du élargir son action en intégrant d’autres aspects de la vie en société : défense des droits de l’homme, collectivités…. Si bien que le concept de justice verte s’empare des esprits et des politiques. Ces rapports embryonnaires sont féconds de projets alternatifs qui pourraient prendre le relais de mouvements sociaux de l’identité légitimante.

     

    Le patriarcat en danger

    Le mouvement féministe est un autre exemple d’identité projet dans la mesure ou il est susceptible d’apporter un projet de société. Ces conséquences sont bouleversantes pour le patriarcat.

    Le patriarcat est une structure fondamentale des sociétés contemporaines, une autorité institutionnalisée des hommes sur les femmes et les enfants au sein du groupe familial. Le patriarcat naît dans la structure familiale et la reproduction sociobiologique telle qu’héritée de l’histoire et de la culture.

     

    1) La désintégration de la famille patriarcale

    Aujourd’hui, La famille patriarcale subit 2 pressions indissociables nées de la mondialisation et des changements technologiques dans la reproduction de l’espèce humaine et d’autre part des luttes des femmes et d’un mouvement féministe multiforme.

    La prise de conscience des femmes et le changement de valeur dans les sociétés en moins de 3 décennies ont bouleversé la totalité du champ humain, du pouvoir politique à la structure de la personnalité. Si les idées féministes s’expriment depuis plus d’un siècle, ce mouvement a pris de l’ampleur grâce à 4 facteurs :

    Leur entrée dans la main d’œuvre rétribuée s’est réalisée à partir de :

    L’explosion croissance de l’emploi des femmes s’explique par :

    Cette dynamique provoque des modifications au sein de la famille : La rétribution de leur travail augmente leur pouvoir de négociation et sape du même coup la légitimité de la domination du mari.

    La mutation technologique en biologie, en pharmacologie, et en médecine

    Les femmes deviennent maîtres du moment et de la fréquence de leur grossesse grâce au moyens de contraception, à la gestion de la fécondation, et grâce aux manipulations génétiques.

    l’impact du développement du féminisme sur le patriarcat

    Le féminisme est "un engagement pour mettre fin à la domination masculine. C’est une (re)définition de l’identité de la femme. C est refusé l’identité de la femme telle qu’elle est définie par les hommes et postulée par la famille patriarcale".

    Le féminisme remet en cause l’hétérosexualité comme norme. Les lesbiennes pour pallier l’oppression mâle. Les gays pour pallier la remise en cause de la famille traditionnelle et les relations conflictuelles entre hommes et femmes.

    Ces mouvements se sont développés et renforcés grâce à :

    Ils se définissent comme deux puissantes expressions d’identité de libération sexuelle : les Lesbiennes et les Gays. S’il existe des prédispositions biologiques, l’essentiel du désir homosexuel se mêle à d’autres pulsions et sentiments : L’homosexualité devient l’expression du moi et une identité projet.

    Ils critiquent la normalisation sexuelle et de la famille patriarcale. Leur défi s’avère effrayant pour cette dernière, car la recherche biologique et la technologie médicale rendent possible de dissocier hétérosexualité, patriarcat et reproduction de l’espèce (couple homo désirant élever des enfants). Le brouillage des frontières sexuelles opère un découplage entre famille, sexualité, amour, féminité / virilité et pouvoir, et introduit une critique du monde que nous avons connu. On essaie de nouveau modèle de groupes familiaux ce qui laisse présager la fin de la famille telle que nous l’avons connue.

    La société en réseau et l’absence de sanctions légales affaiblissent le patriarcat

    On assiste donc à :

    On ne voit pas émerger de nouveau type dominant, la diversité est la règle. Cependant certains traits semblent cruciaux dans les nouveaux dispositifs :

    Le nouveau processus de socialisation minore les tendances institutionnelles de la famille patriarcale et diversifie les fonctions au sein des familles. L’individualisation croissante des relations dans le groupe familial met l’accent sur les relations personnelles qui paraissent plus importantes que les règles des institutions. La sexualité devient une expression du moi.

    De nouvelles personnalités apparaissent. Plus complexes, moins sûres d’elles, elles sont capables de s’adapter aux changements de rôle dans les contextes sociaux, et sont sexuellement plus libres.

    "La violence des réactions pour défendre le patriarcat (mouvements fondamentalismes religieux) témoigne de l’intensité des défis qui lui sont lancés et ceci bien qu’il soit encore la référence. Les mouvements sociaux féministes et d’identités sexuelles qui attaquent le patriarcat exigent de l’état des décisions extraordinaires dans une période ou celui-ci semble au beau milieu d’une crise structurelle, né de la contradiction entre son avenir mondialisé et son passé identitaire".

     

    L’état à la dérive

    Mondialisation et mouvements sociaux remettent en cause de l'Etat Nation et provoquent une crise de la démocratie politique, par la médiatisation que ces mouvements sociaux utilisent.

    Le contrôle de l’état sur l’espace et le temps se voit contourné par :

    L’état nation perd de son pouvoir de par son incapacité à naviguer entre la puissance des réseaux mondiaux et l’assaut des identités singulières.

     

    1) Mondialisation et Etat

    La mondialisation a un fort impact sur l’Etat.

    La mondialisation des activités économiques stratégiques lui fait perdre son pouvoir économique

    L’Etat Nation est impuissant à déterminer sa politique monétaire, à décider de son budget, à organiser la production et le commerce à faire payer des impôts à ses entreprises et tenir ses engagements en matières de prestations sociales.

    La mondialisation des médias et de la communication électronique lui fait perdre son contrôle de l’information et les loisirs

    En effet, la mondialisation - localisation des médias et de la communication électronique conduit à dénationaliser et à désétatiser l’information.

    La mondialisation de la criminalité paralyse l’état

    L’organisation et la capacité de la criminalité à influer les relations internationales sont un phénomène nouveau. Au trafic de drogue s’ajoute trafics d’armes, d’êtres humains, organes humains, tueurs à gages etc… qui sont liés par le blanchiment d’argent. Sans lui, l’économie criminelle n’existerait pas. La mobilité, la flexibilité et le tourbillonnement constant de ces capitaux leur permet de devenir invisibles.

    3 conséquences sur les états nationaux :

     

    2) L’Etat Nation à l’ère du multilatéralisme et de l’interdépendance entre nations

      Le multilatéralisme et l’interdépendance des nations s’expliquent par la dissolution et le relâchement des blocs militaires construits autour des Etats Unies et de l’URSS.

      Ainsi, les fonctions de l’OTAN ont été redéfinies à partir du milieu des années 90, vers l’accomplissement de tâches sécurisantes pour le compte d’un vaste consortium de nations en association avec les Nations Unies.

       

    3) L’impact des technologies nouvelles sur l’art de la guerre décentralise "L'équilibre de la terreur" planétaire en de multiples "équilibres de la terreur" locaux.

      L’industrialisation de nouvelles régions du monde, la diffusion du savoir scientifique et technologique et les trafics illégaux en tout genre continuent d’alimenter la prolifération des armes nucléaires, chimiques et bactériologiques.

      Si les Etats Nations dépendent de plus en plus des technologies de pointe pour la guerre conventionnelle, ils pourraient donc avoir accès aux "technologies du Veto" (armes de destruction massive, qui par leur existence même, peuvent dissuader un Etat plus puissant de gagner).

       

    4) La compréhension par la société des grands problèmes de l’humanité, de l’environnement pousse les états nations à créer un pouvoir supranational pour surmonter leur impuissance (exemple : l’Europe)

     

    5) Identités, pouvoirs locaux, et déconstruction de l’état nation

    La plupart des Etats Nations modernes ont été construits sur la négation des identités historiques et culturelles de leur composante, aux profit de celles qui convenaient le mieux aux intérêts des groupe sociaux dominants initiateurs de l’état.

    A l’époque moderne, c’est l’état qui crée l’état nation et non la nation

    L’inégale représentation des milieux sociaux, des cultures et des territoires au sein de l’Etat Nation a fait pencher les institutions nationales dans le sens des intérêts des élites, créant de fait des conditions de crise politique lorsque des identités subordonnées, issues de l’histoire ou de l’idéologie, se sont montrées capables de se mobiliser pour obtenir la renégociation du pacte national historique.

    Crise de légitimité de l’état

    La structure de l’Etat Nation est territorialement différenciée. Elle implique un partage ou non partage du pouvoir entre les intérêts sociaux, les cultures, les régions, et les nationalités qui le compose. La différenciation territoriale permet à des états, souvent gouvernés dans l’intérêt d’une minorité, de ne pas recourir à la répression. On assiste à la construction à géométrie complexe des relations entre l’Etat, les classes sociales, les groupes sociaux et les identités présentes dans les sociétés civiles.

    Différentes identités transmettent leurs revendications, leurs exigences et leurs défis à l’Etat Nation. Celui-ci est incapable de répondre simultanément à toutes ces demandes, d’ou le concept de "crise de légitimité" (Habermas).

    Retrouver la légitimité : transfert des pouvoirs aux institutions politiques régionales et locales.

    Ainsi, Les identités minoritaires, régionales et nationales trouvent plus facile de s’exprimer à ce niveau et l’Etat Nation peut se consacrer à la gestion des défis stratégiques retrouvant du même coup sa légitimité.

    "A l’ère de l’information , les états nationaux, sont trop petit pour manier les forces mondiales, mais trop grands pour gérer la vie des individus"

    Le problème et que les instituions politiques décentralisée, dans un souci de répondre aux attentes de leurs citoyens, prennent des initiatives et s’engagent dans des stratégies de développement en liaison avec le système mondial. Elles entrent en concurrence avec leur propre état.

     

    6) L’état identitaire

    L’autonomie locale et régionale renforce les élites et les identités territoriales dominantes.

    Elle spolie d’autres groupes sociaux, soit parce qu’ils ne sont pas représentés dans ces institutions d’administration autonome, soit parce qu’ils se trouvent enfermés dans des ghettos et sont isolés. deux dynamiques s’instaurent :

    Une situation différente s’instaure quand les identités et les intérêts dominants dans les institutions locales rejettent la notion d’intégration. Le rejet signifié par la culture officielle pousse les exclus par réaction, à mettre toute leur fierté dans leur identité exclue. Elles appellent l’état national pour voir leurs droits reconnus et leurs intérêts défendus, par dessus la tête des institutions locales et régionales et contre elles.

    Mais l’état nation pour surmonter sa crise légitimité aux yeux de la majorité transfère de plus en plus de pouvoir aux institutions décentralisées. Il est donc moins capable d’égaliser les intérêts des diverses identités et groupes sociaux de son territoire aggravant sa crise de légitimité.

    Une force sociale et politique, définie par une identité particulière (ethnique, territoriale, religieuse), peut s’emparer de l’état pour en faire l’expression exclusive de cette identité comme par exemple la République Islamique d’Iran. Mais, le fondamentalisme est la manifestation la plus forte de la mort de l’état nation car il doit manœuvrer avec d’autres organisations de croyants pour favoriser la propagation de la foi, en vue de refondre les institutions nationales, internationales et locales autour des principes de cette foi. Le projet fondamentaliste est une théocratie mondiale, non un état religieux national.

     

    7) Etat, violence et surveillance :

      Si l’état dispose de moyens technologiques, pour assurer la surveillance, et contrôle un stock d’information sans précédent, les citoyens disposent également des sources qui leurs permettent de contrôler l’Etat.

      "Le pouvoir de la technologie amplifie les tendances intrinsèques des structures sociales et des institutions".

      Une évolution plus récente sape le pouvoir de l’Etat Nation : la capacité de surveillance et les moyens de la violence se diffusent en dehors des institutions de l’état et au delà des frontières de la Nation. L’extension de la surveillance au-delà de l’état ("l’œil électronique") par le biais des grandes firmes et des organisations de toutes sortes ainsi que la création d’un marché de la surveillance se diffuse dans l’ensemble de la société.

      La relation entre Etat et médias est plus manifeste. Ces derniers disposent de moyens technologiques modernes pour surveiller les agissements de l’Etat au nom de la société et/ou de grands groupes de pression spécifique. Les médias ont accru la vulnérabilité de l’Etat.

      L’Etat perd le monopole de la violence au profit de réseaux terroriste transnationaux ou groupe communautaires recourant à une vigilance suicidaire. Les premiers entraînent une coopération systémique entre les polices des états nations. Les second, bandes communautaires, ou gangs locaux ne voulant plus être intégrer à la nation, sont susceptibles de vulnérabiliser l’Etat face à une violence ancrée dans la structure de sa propre société.

       

    8) Apparition d’un nouveau système de pouvoir caractérisé par la pluralité des sources d’autorité.

    l’Etat Nation n’est qu’une de ces sources. Il n’occupe plus la place centrale du royaume de souveraineté partagée qu’est devenue la scène politique mondiale. Il fonctionne comme cité internationale. Les Etats Nations ne disparaîtront pas. Ils seront de plus en plus des nœuds dans un réseau plus large du pouvoir.

    Pour comprendre les rapports de pouvoir, il faut reconstruire les catégories sans postuler une intersection nécessaire entre la Nation et l’Etat, c’est à dire séparer l’identitaire de l’utilitaire.

    A la crise de l’Etat Nation s’ajoute l’explosion des nationalismes, responsables de la crise des Etats Nations et dont l’objectif est d’élaborer, ou ré-élaborer, un nouvel état fondé sur l’identité.

    Les Etats Nations peuvent exercés une influence considérable sans détenir aucun pouvoir par eux mêmes. Isolés des macro forces supranationales et des micro processus infra-nationaux, ils émergent comme des acteurs de premier plan dans un monde purement stratégique.

     

    Le changement social dans la société en réseaux

    La résiliation du contrat social entre le capital, le travail est l’état renvoie chacun chez soi, intimant de se battre seul pour ses intérêts personnels en comptant sur ses propres forces.

    la société en réseaux transforme la politique et les processus démocratiques : Elle produit des effets directs sur le débat politique et les stratégies de pouvoir.

    Les médias sont devenus l’espace politique privilégié. Sans eux, on a aucune chance de parvenir au pouvoir, ni de l’exercer.

    La crise du système politique et le développement des médias convergent pour enfermer la communication et l’information politique dans l’espace médiatique. Celui-ci a un impact sur les élections, l’organisation de la vie publique, la prise de décision, le mode de gouvernement. Il modifie la nature du rapport entre état et société.

     

    1) Crise de la démocratie

      Le rejet du keynésianisme et le déclin du mouvement ouvrier ont précipité la mort de l’Etat Nation souverain en amoindrissant sa légitimité.

      L’état a déplacer sa source de légitimité. Il exprime une identité collective en s’identifiant à un communautarisme et en excluant toutes autres valeurs, dont les identités minoritaires. C’est le cas des Etats fondamentalistes. Ils ne maintiendront pas la démocratie.

      Le système des partis politique a perdu sont attrait et sa capacité à inspirer confiance. Il est un vestige bureaucratique. L’opinion publique et les citoyens manifestent une désaffection à l’égard des partis, des hommes politiques, et de la politique professionnelle tout en continuant à s’intéresser à la démocratie car son concept est récent (des gens se sont battus pour l’avoir). La désaffection vient de l’incapacité de l’état à résoudre les problèmes des citoyens et du cynisme opportunisme des hommes politiques professionnels. Elle a également pour origine la versatilité mondiale de l’électorat, qui fait tomber les partis de gouvernement et accélère le rythme de l’alternance politique.

      On vit une période de fragmentation de l’état, d’imprévisibilité du système politique et de singularisation de la politique. Les nouvelles conditions politiques, culturelles et technologiques de son exercice ont rendu obsolètes l’actuel système des partis et le régime existant de compétition politique. Les citoyens sont encore des citoyens, mais ils ne savent plus très bien de quelle cité, ni à qui elle appartient.

       

    2) Reconstruire la démocratie

    Les voies potentielles de reconstruction démocratique, telles qu’elles se manifestent dans la pratique observée des sociétés depuis le milieu des années 90, se caractérisent par :

     

    CONCLUSION


    1) Les identités légitimantes se sont taries

      La remise en cause du patriarcat perturbe la transmission des codes culturels entre générations. Ainsi, les idéologies politiques qui émanent des institutions et organisations de l’ère industrielle, du libéralisme démocratique reposant sur l’état nation, au socialisme fondé sur la classe ouvrière, se trouvent privées de significations réelles dans le nouveau contexte social. Elles perdent de leurs attraits et, pour tenter de survivre, s’engagent dans une suite d’adaptation sans fin, courant derrière la nouvelle société. Elles sont devenues des coquilles vides.

       

    2) Émergence de puissantes identités résistances susceptibles de se transformer en identités projets

      Elles construisent leur communauté autour des valeurs traditionnelles – Dieu, la nation, la famille – et fortifient leurs campements avec des emblèmes ethniques et des défenses territoriales.

      Elles peuvent aussi être édifiées par des mouvements sociaux novateurs et autour d’eux, s’ils ont décidé d’établir leur autonomie par une résistance communautaire en attendant d’être assez fort pour passer à l’offensive contre les institutions oppressives (mouvement environnementaliste et féministe).

      Ces identités communiquent avec l’état pour lutter et négocier leurs valeurs et intérêts particuliers. Elles ne communiquent pas entre elles car construites autour de principes radicalement différents qui définissent un intérieur et un extérieur. Elles n’acceptent pas les auto-définitions individuelles.

       

    3) le pouvoir siège dans les esprits

      La société en réseaux sécrète ses propres oppositions : les identités résistances communautaires et les identités projets susceptibles d’en émerger, par des moyens spécifiques, par des conditions spécifiques, dans chaque contexte politique et culturel.

      Le pouvoir s’est diffusé dans les réseaux mondiaux du capital, de la puissance, de l’information et de l’image, qui circulent et se transforment, configurant des systèmes à géométrie variable et à géographie dématérialisée.

      Le pouvoir règne toujours sur la société. Il continue à nous déterminer et à nous dominer sous une forme différente. Ce nouveau pouvoir réside dans les codes (informations) et les images (représentations) autour desquels les sociétés organisent leur institutions et les individus leurs comportements et leurs vies. Ces sièges sont les esprits. Voilà pourquoi le pouvoir est en même temps identifiable et diffus dans la société en réseaux. Qui gagne la bataille des esprits gouvernera, car les puissants appareils rigides ne feront pas le poids contre les cerveaux mobilisés autour de souples réseaux alternatifs. Mais les victoires pourront être éphémères, puisque les turbulences des flux d’information maintiendront les codes dans un tourbillon constant ; c’est pour cela que les identités sont importantes et puissantes, dans cette structure de pouvoir qui change continuellement.

       

    4) Les sujets de l’ère de l’information

      Les mouvements sociaux qui émergent de la résistance communautaire à la mondialisation, à la restructuration capitalistique, à l’organisation en réseaux, à l’informationnalisme incontrôlé et au patriarcat – les écologistes, les féministes, les fondamentalistes religieux, les nationalistes et les localistes- sont les sujets potentiel de l’ère de l’information.

       

    5) Sous quelle forme vont-ils s’exprimer ? quelques hypothèses

    Les portes voix des projets identitaires doivent être capables de mobiliser des symboles.

    Ils doivent agir sur la culture de la virtualité réelle qui cadre la communication dans la société en réseaux. 2 leviers d’actions :

    Les prophètes : personnalités symboliques dont le rôle consiste à donner un visage à une insurrection symbolique : ils parlent au nom des insurgés

    Une forme d’organisation et d’intervention décentralisée, en réseaux, caractéristique des nouveaux activismes sociaux, qui reflète et contrarie en même temps la logique de la mise en réseaux propre à la domination dans la société informationnelle. Ces réseaux sont les vrais producteurs et diffuseurs des codes culturels.

    Leur impact sur la société vient de turbulences dans le réseau interactif d’une communication multiforme. C’est cette légèreté du réseau de changement social et cette absence de centre qui rendent si difficile à percevoir et à identifier les nouveaux projets identitaires en gestation.

     

    Actualités du sujet

    Si il est un sujet d’actualités, c’est bien le thème des mouvements sociaux, mais aussi de tout les liens qui interférent avec et autour de lui et qui agissent sur la société : mondialisation, économie, techniques et technologies, organisations…

    Un supplément du Monde, intitulé "21 questions au XXI siècle", parue en janvier 2000, invite à découvrir les profondes mutations qui ont lieu.

    Dans l’article intitulé "Cyberbia ou Cyberkeley ? ou comment Internet peut anéantir ou favoriser les libertés", sylvain Cypel, journaliste, s’appuie sur Laurent Kott, l’un des directeurs de l’INRIA (Institut National de la recherche en informatique et en automatique) pour définir Internet : "socialement, il favorise l’individu sur le groupe et les petites communautés thématiques sur les grandes institutions. Son impact majeur tient dans son économie. Sa principale conséquence est de remettre en cause les privilèges des experts à commencer par les Etats".

    Puis il explique que la montée en puissance des réseaux et des machines intelligentes, déstabilisent les élites et modifient les modes d’identification des individus, poussant inexorablement à une passation de pouvoir des organisations (Etats partis, syndicats et même entreprise) vers les individus et les petits groupes, vecteurs de l’innovation.

    2 tendances apparaissent :

    L’une positive, met l’accent sur l’émergence de la post politique, émanation de l’hyper citoyen.

    Peter Drucker décrit un ordre dans lequel la connaissance, et non plus le travail, les matières premières ou le capital, constituera la ressource clé. Le E-Commerce transformera la géographie mentale des hommes.

    S’appuyant sur Daniel Weitzner, dirigeant du WWW Consorsium, il indique les conséquences positives que peut avoir Internet : Toute une génération impliquée dans les processus démocratiques va grandir dans l’attente d’un accès facile et en temps réel aux documents de travail des gouvernements et des preneurs de décision, dans une dimension jamais connue depuis la démocratie directe d’Athènes.

    La seconde, en opposition, entrevoit une terrifiante sainte alliance entre l’état l’entreprise et les nouveaux experts réduisant à néant la conscience politique collective

    Les réseaux rapprochent les semblables. Cette hypothèse tend à accroître les disparités entre riche et pauvre et donc entre détenteurs et exclus du savoir technologique. Ainsi plus l’offensive démocratique va de pair avec la mondialisation, plus elle renforce l’identité des faibles entraînant autoritarisme et mafias.

    Le poids des entreprises est plus fort que celui des états. Ces derniers s’allient à ses groupes entraînant une crise de la démocratie caractérisée par une désaffection des électeurs.

    La montée en puissance d’organismes auto désignés comme le World Wide Web Consorsium qui regroupe 275 entreprises membres (entreprises de l’économie en réseaux, universités, ONG, administrations). Si ces objectifs sont nobles au départ, il déborde aujourd’hui de son cadre de compétences techniques. Par exemple, son système PICS de protection de l’enfance sur le net s’est imposé à la volonté du congrès américain, empêchant ce dernier de légiférer ce qui fait dire à certains, que les maîtres de ces réseaux pourront déterminer les standards en matière de santé d’éducation de vie privée…Bref un contrôle de tout nos faits et gestes.

    C’est l’apparition des NTIC et l’accès possible à un grand nombre d’individu qui est le levier de l’actualité et qui questionne son impact sur la société. Autrement dit, parce qu’il y a Internet, on essaie de comprendre ce qui se passe aujourd’hui et on pronostique sur ce que pourra être demain. Ce qui invite à une nécessaire prudence dans les prévisions que l’on nous propose. Certains comme Dominique Wolton du CNRS pense que même si ces technologies représente un enjeu énorme, il faut relativiser et d’expliquer : "Internet ne rencontre aucun projet socioculturel neuf, n’est accompagné d’aucun dépassements des projets précédents et s’insère dans le modèle socio-politique qui gère les contradictions entre libertés individuelles et collectives ; la démocratie. Il ne créera donc ni nouvelle classe dirigeante, ni citoyen universel. On va connaître 15 ans de folie Internet, . puis, on assistera au grand retour de l’homme".

     

    Commentaires

    1) Une vision systémique du monde d’aujourd’hui

      L’auteur nous propose une vision systémique de notre société : il établit des liens entre l’état, les mouvements sociaux, la société en réseau et le patriarcat en faisant appel à l’histoire, caractérisant le présent, et en anticipant l’avenir de chacune des parties, le tout baigné dans une dimension mondiale : le multiculturalisme.

      Les liens que tissent l’étude entre les nouveaux mouvements sociaux, la mondialisation et ses caractéristiques (Société en réseau, restructuration du capitalisme, NTIC) et le patriarcat et l’état montre comment chaque élément tire son information des autres éléments et agit sur eux. Pour comprendre un élément, il faut le considérer dans le contexte où il interagit. L’exemple du mouvement vert est représentatif de cette idée. Castells montre comment ce mouvement utilise l’information, les nouvelles technologies, la science, et enfin l’état et la justice pour développer ses idées.

      Les mouvements sociaux existent grâce à l’identité. Celle-ci donne de sens au groupe et à l’individu qui s’y identifie. On retrouve donc le principe de totalité, à savoir : lorsqu’il y a un regroupement d’éléments, la logique de groupe constitué prime sur celle de chaque élément qui le compose. L’auto définition est exclue.

      On retrouve un autre principe : le principe de rétroaction ou de causalité circulaire.

      L’état en voulant jouer un rôle important sur la mondialisation négligent ses mandants. Ceux-ci, par l’intermédiaire des groupes sociaux réagit entraînant la crise de légitimité de l’état.

      On comprend mieux l’utilisation de l’identité au regard du principe d’homéostasie qui montre que lorsqu’un système subit une transformation il a tendance à revenir à son état antérieur.

      La mondialisation agit sur nos vies. Elle remet en cause nos façons de faire. Pour lutter face à cette évolution, les gens se réfugient dans des mouvements sociaux traditionnels (légitimants, résistants) qui affirment ce qu’ils sont avec plus de force.

      La typologie des identités que produit Castells montre enfin le principe d’équifinalité ; en effet, on peut obtenir un résultat identique, ici la lutte contre la mondialisation à partir de conditions initiales différentes (mouvements sociaux légitimes, projets, défensifs…) et en empruntant des chemins différents, comme illustrés par les différents exemples de l’auteur.

       

    2) Analyse stratégique des acteurs

    On retrouve en ce sens, les travaux réalisés par Michel CROZIER au travers de son livre "le phénomène bureaucratique" qui met en évidence les jeux de pouvoir entre groupe d’individus. Crozier réalise une enquête dans une grande entreprise industrielle française où des problèmes apparaissent entre les groupes de travail d’un atelier.

    L’étude de manuel Castells utilise la même approche. Il décrit :

    Puis, il commente la structure de pouvoir en argumentant que seules les identités résistances, dans la mesure où celles–ci deviennent capables de porter un projet alternatif, et les identités projets peuvent accéder au pouvoir.

     

    3) Les identités projets sont condamnées à disparaître dans le temps

      La terminologie utilisée par l’auteur fait réfléchir. Il explique que ce sont ces mouvements, parce qu’ils sont porteurs de projets alternatifs, qui détiendront une place importante dans nos sociétés (verts, féministes).

      Or la logique projet est par définition d’une durée limitée. On peut en déduire qu’une fois satisfaits, on n’entendra plus parler d’eux. Or qu’est-ce- qui les caractérisent ? Est-ce leur projet réellement ou leur volonté d’accéder au pouvoir ? ont-ils un avenir puisqu’ils ne sont que des projets ?

      Dans les 2 cas, il semble que l’on soit dans une impasse. En effet reprenons l’exemple vert. Ce mouvement est constitué de plusieurs groupes. Si dans leur finalité (leur projet), ils souhaitent tous un respect de l’environnement, ils risquent de s’affronter sur des points "de détails" dans le temps et donc perdre de leur cohérence et donc de leur pouvoir puisque les citoyens seront informés par différents réseaux.

      Donc, soit ils restent une identité projet et continuent à fédérer et à transmettre leurs idées en luttant face à l’état, soit ils accèdent au pouvoir et prennent donc le risque de se désunir. Autrement dit, lorsque les projets se multiplient, il faut repenser l’organisation globale pour coordonner les projets entre eux. Y arriveront-ils ?

      Enfin, dans le meilleur des cas –pour eux- en supposant qu’ils réalisent leur projet, leur mission, ils deviendront des identités légitimantes, dans la mesure où de nouveaux mouvements naîtront qui contourneront les réseaux du pouvoir pour prendre la place, bouclant la boucle.

       

    4) L’identité et (ou est) la motivation : une étape dans l’évolution des sociétés

    Des gens se regroupent sous forme de mouvements sociaux. Ils le font au titre du sens. L’identité organise le sens pour les groupes et les individus eux mêmes.
    On parle de motivation au travers de la pyramide de Maslow. Elle propose de classer les besoins en 5 catégories :

    ils sont liés à la survie des individus : respirer, boire, manger

    visent à se protéger des dangers qui menacent les individus

    L’identité se situe au niveau des besoins d’appartenance, c’est-à-dire lorsque les 2 besoins précédents sont satisfaits. L’apport de Maslow consiste à offrir une perspective, une évolution de l’homme : L’homme est un individu qui vit en société, il éprouve le besoin de vivre avec d’autres individus.

    Vu sous cet angle apparaît 3 questions fondamentales :

    Est ce la mondialisation qui est responsable du développement des mouvements sociaux identitaires ? C’est le point de vue de l’auteur

    Mais n’est-ce pas les mouvements sociaux qui créent la mondialisation grâce à leur identité?

    Un des arguments de l’auteur pour parler de la fin du patriarcat consiste à démontrer que, çà et là, des mouvements naissent pour le défendre et donc si on le défend, c’est qu’il est menacé. Par analogie on peut pratiquer le même raisonnement quant à la mondialisation : de nouveaux groupes sociaux se développent ce qui montre bien que la mondialisation existe.

    Enfin, l’identité est-elle simplement un besoin des individus qui trouvent dans les NTIC un outil pour franchir et faire franchir un cap à l’ensemble de la société ?

    Au regard de cette hypothèse on comprend mieux, la diversité des identités choisies et les changements qui s’opèrent en deviennent du coup plus facile à supporter puisqu’ inscrit dans un modèle, la pyramide de Maslow, qui montre la voie d’une évolution : Après l’assouvissement des besoins d’appartenance viennent l’assouvissement des besoins d’estime, puis les besoins d’épanouissement.

     

    5) Contradiction entre mondialisation et localités.

      La société en réseaux gomme les frontières. Le réseau offre une alternative à la hiérarchie ce qui est censé rendre les salariés plus satisfaits. Or des individus se sentent exclus et réagissent avec plus ou moins de violence. Ils cherchent à trouver un compromis acceptable entre ce rouleau compresseur qu’est la mondialisation et leurs propres intérêts au travers d’une identité qu’ils s’accaparent. On retrouve donc l’idée de contradiction entre l’espace géographique des marchés est celui des nations. Or ici, la nation en prend un coup : elle n’est plus la valeur fédératrice, de part son nouveau rôle qui consiste à assurer un lien entre la mondialisation et les institutions régionales et locales. C’est l’appropriation de cette identité qui est la principale source de sens de ces mouvements sociaux.

      La grande nouveauté, c’est que l’organisation en réseau a ouvert un champ de liberté grand comme le monde. Si les entreprises sont les premières à l’utiliser, ce qui est confirmé par la progression du nombre des fusions acquisitions à travers le monde, les citoyens opposés à l’ordre mondial sont en train de prendre le pas de réagir. Et pourquoi ne le feraient-ils pas ?

      En effet, historiquement, le réseau est un référent populaire qui en l’absence de hiérarchie ouvre la porte de l’expression et de l’ambition à ces mouvements sociaux.

       

    6) Le réseau "divise et coordonne"

    Mintzberg, dans son livre Structures et dynamiques des organisations fait état de 5 configurations structurelles :

    les mouvements sociaux, décrit par Castells ont des similitudes avec l’adhocratie dans le sens où ils utilisent certains paramètres identiques comme l’ajustement mutuel, des tailles d’unités petites, de nombreux mécanismes de liaison, des flux d’autorité insignifiants, etc…

    Mais la comparaison a ses limites. Elle ne tient pas comte de l’identité et de l’idéologie des mouvements. Il faut se référer à un 6ème type de structure : la configuration missionnaire décrite par Mintzberg.

    "Elle aurait son propre mécanisme de coordination –la socialisation, ou si vous préférez, la standardisation des normes- et un paramètre de conception principal lui correspondant – l’endoctrinement. L’organisation aurait une sixième partie, évidente au moins pour ceux qui ont un sixième sens. Il s’agirait de l’idéologie, une partie vivante sinon animée, de l’organisation missionnaire. Le visiteur ayant suffisamment d’acuité "la sentirait" immédiatement. L’idéologie représente en fait une sixième force importante dans toute les organisations, une poussée s’exerçant dans le sens de l’accomplissement d’une mission".

    Cette vision est confortée, comme nous l’avons signalé plus haut, par le terme de projet que l’on peut assimiler à mission. La référence qui vient s’y ajouter est l’idéologie que je compare à l’identité.

    Les mouvements sociaux auraient donc des structures souples, adaptables leur permettant de réagir vite, contrecarrant du coup les institutions de l’ère industrielle ayant des structures plus lourdes.

     

    7) La mondialisation : Apartheid ou une révolution économique

    Castells en centrant son sujet sur les mouvements sociaux, écarte du même coup une dimension intéressante à développer. En effet, en utilisant comme thème les mouvements sociaux, il induit l’existence d’autres catégories.

    2 logiques s’affrontent :

    L’une privilégiant l’hypothèse d’une société où l’écart entre les riches et les pauvres, entre les connectés et non connectés ne cessera de croître par la mise en place d’une nouvelle classe mondiale : "les manipulateurs de symbole" (Robert Reich, les manipulateurs de symbole)

    "Ces personnes  n’auront aucun sentiment de responsabilité à l’égard d’une nation particulière et de ses citoyens",  "ce sera une élite hors sol dédiée de tout enracinement".

    Il apparaîtrait donc, une nouvelle fracture sociale, entre cette hyperclasse, les "have", (J. Attali, Dictionnaire du XXI siècle) et un Lumperprolétariat (les "haven’t") créant un nouvel apartheid.

    La caractéristique de cette fracture est sa mondialisation et sa cible. Daniel Cohen dans Richesse du monde, Pauvreté des nations parle "d’inégalités intracatégories".

    La mondialisation et le progrès technique mettent en œuvre une dynamique profondément inégalitaire, au terme de laquelle les différences dans les conditions initiales des individus se retrouvent comme cristallisée (…) ceux qui en profitent sont ceux dont le passé a permis une accumulation en capital et en savoir, les autres risquant d’être laissés au bord du chemin.

    Une autre hypothèse nous vient d’Angleterre par Philippe Aghion, conseiller de la banque européènne pour la reconstruction et le développement pour qui "le monde serait entré dans une nouvelle révolution économique, de la même nature et de la même ampleur que celles qu’il avait connues à la fin du XVIII avec la machine à vapeur".

    A chaque fois, une nouvelle technologie à usage général, c’est à dire ayant des implications dans tous les domaines de la vie économiques, est venu tout bouleverser. Cette hypothèse privilégie la généralisation de l’outil comme l’électricité qui finalement a été diffusée à l’ensemble des citoyens.

     

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